Motion factory : ceci n’est pas une exposition

par Elsa Vernier-Lopin 8 Mai 2014, 10:00 Expos

Motion factory : ceci n’est pas une exposition

La Gaité Lyrique nous propose en ce moment de découvrir l’envers du décor des films d’animation : « les ficelles du monde animé ». L’idée est de présenter les « postes de travail » des réalisateurs en montrant leurs croquis, photos de tournage, story-boards ou figurines. L’exposition est organisée autour d’espaces bricolés, en accord avec l’idée de coulisses. Des planches de travail présentent des croquis punaisés comme si on assistait au travail de création de l’artiste.

Un premier obstacle est posé dans le chemin du visiteur : les films sont dans une allée que l’on ne voit pas du côté des « postes de travail ». Le lien est donc difficile à faire pour le spectateur entre l’idée, le processus de création et le film achevé. On perd peu à peu le fil. Les réalisateurs étant présentés deux par deux on ne sait plus qui est l’auteur des objets exposés. Plus d’informations sur les matériaux employés et les techniques de création auraient permis de mieux comprendre le processus artistique.

En sortant de l’exposition on a vu de jolis objets, le cadre était sympathique, mais on n’a pas compris ni appris grand-chose.

Motion factory : ceci n’est pas une expositionMotion factory : ceci n’est pas une exposition

En réalité, le problème de cette exposition se situe en amont. De quoi a-t-on voulu parler ?

La problématique pourrait-être, tout simplement, comment fait-on un film d’animation ? Une série de questions en découle: qu’est ce qu’un film d’animation ? Quelles sont les techniques employées ? À partir de quand a-t-on commencé à faire de l’animation ? Quand est-ce que le numérique est entré dans le jeu ? Y-a-t-il des réfractaires ?

Ces questions de contextualisation ne semblent pas avoir intéressé le réalisateur de films d’animation Yves Geleyn. Evidemment, il connait les réponses. Mais c’est le but d’une exposition de rendre compréhensible ce qui semble évident pour les initiés. Les problèmes de formes sont alors inévitables : de quels matériaux est faite l’œuvre devant moi ? Pourquoi ce cartel est-il écrit en caractère 10 ? Pourquoi le visiteur fait-il des allers-retours dans l’exposition sans comprendre le parcours?

Pourquoi ai-je fait l’exposition en dix minutes ?

Renouveler la présentation des œuvres au public est essentiel. Mais faire participer des artistes pour organiser une exposition n’est pas forcément la solution. Inviter les artistes à créer leur propre exposition n’est pas toujours une bonne idée (Sarah Moon au Museum d’Histoire Naturelle, Matthew Barney à la BNF) mais peut se justifier dans la mesure où l’on choisit d’exposer des artistes vivants.

Les artistes ont-ils la compétence pour proposer une exposition thématique ? La création artistique et la transmission d’un savoir ne sont pas la même chose. Il doit y avoir une réflexion préliminaire sur ce que le visiteur peut apprendre des œuvres d’art qu’on lui présente. Les objets sont au service d’une problématique qui doit être comprise par le visiteur. Ai-je pu répondre à la question : comment fait-on un film d’animation ? Non.

J’aimerais que cette phrase soit de Desproges mais elle est des Inconnus : « il ne faut pas prendre les gens pour des cons mais ne pas oublier qu’ils le sont ». Le visiteur est ignorant en entrant dans une exposition, le but est qu’il le soit un peu moins en sortant. En sortant de la Gaité Lyrique j’étais toujours aussi stupide.

Motion factory : ceci n’est pas une exposition
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Motion Factory

La Gaité Lyrique

3 bis rue Papin,75003 Paris

Jusqu'au 10 août

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